Sans tambour ni trompette

C'est sous une pluie batante qu'un petit convoi fit son apparition, à l'horizon. Composé d'un chariot couvert et de cinq ou six cavaliers, tout au plus, le convoi approchait à bonne allure de la Cour au Gibet, avec la hâte de ceux qui enfin, se savent sur le point de rentrer chez eux. Si le convoi était modeste, pour ne point attirer l'attention sur la précieuse charge qu'il transportait, les gardes qui l'entouraient étaient des plus efficaces, mais malgré le tumulte politique qui continuait de reigner, le voyage s'était fait relativement sans encombres, et ils n'avaient croisé rien de plus menaçant que quelques ivres fourbes ou piètres brigands.

Le chariot s'arrêta devant les grande portes du château et le cocher s'empressa d'en descendre pour se rendre à l'arrière. Il souleva la tenture délicatement. À l'intérieur se trouvait une femme encore plutôt jeune vêtue de ses habits de voyage. Elle tenait dans ses bras un paquet fort enveloppé pour le protéger des journées de plus en plus froide. Le cocher tandis sa main, et ajustant son châle pour bien se couvrir et sa charge également, Radegonde l'accepta, tâchant de descendre du chariot le plus doucement possible.

Le ciel sembla se couvrir davantage, et la femme leva un sourire reconnaissant sur l'intendant, venu à leur rencontre, qui tenait sa cape au dessus de leurs têtes pour les protéger de la pluie. Elle le suivit jusqu'à l'intérieur, le plus rapidement possible. Tenant toujours sa charge collée contre elle, elle laissa l'intendant la débarrasser de son châle humide, puis satisfaite qu'elle ne risquait aucun inconfort, elle découvrit doucement la tête de l'enfant endormie.

Elle inspira, soulagée, heureuse d'être enfin arrivée à bon port après plusieurs jours de voyage et plsuieurs mois d'exil. Déjà, elle entendait les échos de leur arrivée se répandre parmi les gens de la maison. Bougeant le moins possible pour ne pas réveiller la fillette, elle tenta d'arranger un peu ses vêtements, pour être un peu plus présentable.

Avertie à la dernière seconde de l'arrivée du convoi, Mathilde était montée immédiatement avec Clotaire pour l'accueillir. Le Seigneur et la Dame auraient dû s'y trouver également, toute la maisonnée, en fait, avait prévu accueillir comme il se doit le retour de l'héritière, mais le convoi n'était attendu que plus tard dans la journée. La vielle femme avait envoyé une servante quérir les parents, qui devaient être bien anxieux de revoir enfin leur trésor. C'est donc dans le silence et le calme, interrompus seulement par les éclats de l'orage, que la nourrice remit les pieds à la Cour au Gibet, portant le bébé endormi.

Lorsque la nourrice dégagea le visage de l'enfant, Mathilde fut surprise de n'y voir pas un bébé, mais une fillette. S'était-il déjà vraiment écoulé plus d'un an depuis sa naissance? Attendrit, elle sourit à la jeune femme. Derrière elle, elle entendait qu'on approchait au pas de course.

Bienvenue chez toi, petit ange. Un murmure, pour ne point réveiller l'enfant...

Wandrian avait laissé son époux à son bain, bien mérité, et s'était retirée dans son boudoir, déjà impatiente de le revoir. Elle avait tenté de se motiver à accomplir quelque chose, n'importe quoi, répondre à du courrier, tisser… en vain. Un coup frappé à la porte avait interrompu ses pensées. Une servante venait l'aviser du retour devancé du convoi en provenance de l'Anjou.

Après un moment de surprise, sans même répondre à la jeune fille, la Dame s'élança à l'extérieur, dévalant les escaliers, faisant fi de toute dignité ou de toute convenance. Elle prit tout juste la peine de lancer à la première personne qu'elle croisa d'avertir son époux de la nouvelle immédiatement, ne remarquant même pas qu'il s'agissait de la nouvelle intendante de ce dernier.

Elle s'arrêta net juste avant de pénétrer dans le hall d'entrée, la petite troupe n'ayant pas encore eu le temps de se rendre plus loin. Essayant de se donner une certaine contenance malgré l'émotion qui la tenait, Wandrian avança lentement, presque hésitante, même. Elle était pâle, et son cœur batait à tout rompre. Deux retours dans une même journée, deux retour qu'elle attendait avec tant de hâte qu'elle avait été sur le point d'exploser!
Elle avait dû faire quelque chose de bien pour qu'Aristote lui rende, dans sa magnanimité, les deux être qu'elle aimait le plus au monde, en l'espace de quelques heures.

Dès qu'elle entra, la nourrice la salua d'une discrète révérence, tenant fermement l'enfant que l'agitation environnante commençait à réveiller. Wandrian aurait voulu prononcer quelques paroles pour l'accueillir, mais l'émotion était trop forte. Radegonde s'avança vers elle et, doucement, déposa l'enfant dans ses bras. La mère contempla sa fille un moment, sans mot dire, un peu surprise de la sentir beaucoup plus lourde qu'au moment de son départ.

Tandis que l'enfant ouvrait les yeux, elle murmura :

Belle Évangéline, douce Évangéline, tant de temps s'est écoulé depuis que nous avons été séparées! Bienvenue chez toi, mon bel ange…

Elle déposa le plus délicat des baisers sur le duvet qui recouvrait sa tête, laissant une larme de bonheur couler sur sa joue.

Famille Nombre de messages : 8 Date d'inscription : 20/10/2007

Bercée par le roulis du chariot, elle s'était endormie, roulée contre la chaleur et la douceur de sa nounou. Heureusement qu'elle était avec elle, Nounou. C'était tout petit, ici, et elle n'avait pas de place pour jouer.
Et même quand ils s'arrêtaient, les messieurs dehors ne la laissaient jamais courrir. Mais dans les bras de Nounou, elle était bien.

Quelque chose avait changé. Elle ne sentait plus le roulis. Et le gros bruit du tonnerre, il était moins épeurant, d'un coup. Lentement, encore toute embrouillée de sommeil, Évangéline ouvrit les yeux. Doucement d'abord, puis elle les écarquilla soudainement. Ce n'était plus Nounou! Ou elle est? Pourquoi n'était-elle plus là?
Elle fixa le visage de la dame. Qui c'est? Elle chercha Nounou des yeux et lui lança un regard interrogateur, et ne reû en retour qu'un sourire d'encouragement. Elle n'osa pas faire un son.

Belle Évangéline, douce Évangéline, tant de temps s'est écoulé depuis que nous avons été séparées! Bienvenue chez toi, mon bel ange…

Si elle ne comprit les mots que vaguement, elle reconnut néanmoins son nom et... cette voix! Elle l'avait déjà entendue. Et souvent. Des chansons. Des chansons douces, fredonnées avant d'aller au lit.

Les yeux de la dame avaient l'air gentil. Elle empoigna une mèche de cheveux. Ils était doux. Elle sentait bon, la dame. Elle aimait son parfum, il la rassurait. N'estimant pas avoir éré lésée dans cet échange de bras, elle se blottit contre son épaule, observant avec un mélange de curiosité et de méfiance ces autres personnes qui l'entourait.

Tadek arriva en haut des escaliers du grand hall tout essouflé et dans une tenue inapproprié à son titre, mais celà il n'en avait strictement rien à faire.
Il dévala les escaliers quatre à quatre seulement vêtue d'une serviette noué à la taille et encore tout mouillé.

Il arriva aux côtés de son épouse qui portait leur fille, il ouvrit grand les bras et les enlaça tout les deux.

Après quelques secondes, des larmes de joies perlèrent sur ces joues, il serra les deux femmes de sa vie très fort et dit:

Bonjour ma puce, tu m'as tellement manqué.
Dit bonjour à papa, ...

Sur ces mots, les larmes se font plus abondantes et il reprît:

Saches une choses Evangéline, ton papa et ta maman t'aiment très très fort...
Je suis très content de te revoir et que nous soyons enfin réunis.

Il déposa un délicat baiser, mais humide de larmes sur le front de sa fille.
Afin de ne pas se séparer de ces deux femmes et de ne pas rester sur le péron de l'entrée, sans prévenir, il prit Wandrian dans ces bras qui elle même portait Evangéline,
il souleva ces deux femmes sans difficulté et se dirigea vers le salon.